auxiliaires de vie contre Alzheimer
Chaque jour, Jeanne attend son mari pour déjeuner. Chaque
jour, son attente est déçue : Jeanne est veuve depuis dix ans. Une
fois, la vieille dame de 80 ans a été retrouvée à 15 kilomètres de son
appartement parisien. Aux questions insistantes et inquiètes de ses
proches, elle n’a pas su expliquer comment elle était arrivée si loin de
chez elle. Jeanne voyage, sans carte ni boussole, dans un pays qui
a pour nom Alzheimer.
En France, 860 000 personnes souffrent de cette pathologie.Chaque
année, 220 000 nouveaux cas sont recensés. La majorité des malades vit
encore à domicile. Parfois seuls et démunis. Le plus souvent assistés
d’un proche – un conjoint, un fils, une fille – appelé « aidant
familial ». Babeth s’occupe de sa mère, Pauline. Dix ans déjà qu’elle la
voit s’enfoncer dans le brouillard de la maladie.
Faute d’avoir trouvé une autre solution, Babeth a choisi de travailler à mi-temps pour
pouvoir veiller sur elle. Chaque jour, elle répète les mêmes attentions
à une mère qui, parfois, l’injurie, et, le temps passant, la reconnaît
de moins en moins. Les familles touchées par la maladie d’Alzheimer sont
confrontées à un problème crucial : le manque d’auxiliaires de vie en
France. Cette affection fait peur et les vocations ne sont pas légion.
Pendant vingt et un jours, la journaliste Alexandra Alevêque a suivi les pas de ces femmes qui
accompagnent quotidiennement des personnes dépendantes, aussi bien
à leur domicile qu’en établissements spécialisés. Leurs journées
s’apparentent à une course contre la montre : aider à la toilette,
donner à manger, faire le ménage, les courses.
Ces gestes du quotidien ne sont pourtant pas l’essentiel. Une
auxiliaire de vie prodigue d’abord de l’amour, rassure, pallie la
mémoire perdue. Voir sur un visage parcheminé un regard de confiance ou
un sourire d’abandon est leur plus belle récompense. Ce reportage dit
aussi, en filigrane, combien la déficience des politiques publiques en
matière de dépendance ajoute au désarroi des familles de malades.
Florence Malleron
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