Les soins d'escarre (2/3)
SOMMAIRE
Les traitements locaux
Les soins d'escarre de stade 1 se différencient des autres stades étant donné qu'il n'y a pas de rupture cutanée. La peau doit être nourrie et hydratée sur les zones en souffrance, sans être massée ou pétrie (risque d'aggravation). L'utilisation d'huile peroxydée de type Sanyrène® ou Linovera® (non remboursées), est alors indiquée et appréciée par les patients et les soignants (odeur agréable, bonne pénétration). L'application de crème en couche épaisse n'est pas recommandée car elle est inutile, et induit l'application de pansements le plus souvent épais (type « américain ») qui risquent d'augmenter encore davantage l'hyperpression. Parfois, des pansements fins et transparents type film semi perméable (ex. : Tegarderm®) ou hydrocolloïde fin (ex. : Algoplaque® Film) ou encore Hypafix® Transparent (non stérile) et Leukomed® T (stérile) peuvent être appliqués dans un but protecteur (« 2e peau »).
Si la plaie est constituée (> escarre stade 1), la décontamination et le nettoyage sont réalisés le plus souvent à l'eau (+/- savon) lors de la toilette, ou au sérum physiologique.
L'escarre est une plaie chronique et naturellement colonisée nécessitant des soins dits « propres ».
En cas de survenue d'une infection locale, l'application d'antimicrobiens sur une période limitée (8 à 10 jours environ) doit être discutée avec le médecin.
De nouveaux dispositifs permettent d'éliminer les bactéries sans principes actifs. En effet, grâce à ses propriétés hydrophobes, les micro-organismes adhèrent aux fibres de ce pansement et sont éliminés de la plaie lorsque le pansement est changé. D'autres produits, tels que le Prontosan® (non remboursé) sont proposés pour nettoyer plus efficacement la plaie en contrôlant l'équilibre bactérien sous ses différentes formes : bactéries circulantes (le plus souvent pris en considération), ou organisées en mode biofilm. Ces deux cibles d'action font du Prontosan® un produit original et particulièrement intéressant pour les plaies chroniques, stagnantes ou aggravées par des épisodes infectieux répétés potentiellement imputables à la présence de biofilm.
Si l'escarre est superficielle, elle peut être traitée :
1) avec un hydrocolloïde qui ne sera changé qu'à saturation, lorsque le pansement se délite,
2) un hydrocellulaire fin (ex. : Mepilex® e.m, Allevyn®),
3), une interface (ex. : Adaptic® siliconé) recouverte de compresses. Le choix d'une technique par rapport à une autre doit prendre en compte la disponibilité des produits, la fréquence des soins, et le maintien du pansement en place selon le site soigné (talon, sacrum).
Si l'escarre est plus profonde (> stade 2), le soin va dépendre du stade d'évolution de la plaie, si elle est en phase de détersion (présence de nécrose, de fibrine épaisse), ou de bourgeonnement.
L'escarre nécrotique doit être débridée, excepté s'il s'agit d'une plaie à composante artérielle (ex. : escarre talonnière chez un patient artéritique). La détersion mécanique doit être privilégiée car elle permet de raccourcir efficacement cette première phase de cicatrisation. Bien sur, elle peut être complétée (avant, après) par l'application d'hydrogel (ex. : Intrasite® gel) ou de pansements irrigo absorbants type Hydroclean®. Le principe de ces produits est d'apporter un excès d'humidité sur la plaie afin de ramollir la nécrose jusqu'au délitement. Ce mode de détersion (dit « autolytique ») a des limites, notamment si la nécrose est trop épaisse.
L'hydrogel n'est donc pas un substitutif moderne à la détersion mécanique, mais un produit adapté à la phase de détersion.
A cette étape, comme en phase de bourgeonnement, il est aussi possible d'appliquer des fibres de CMC (Aquacel®) ou alginate (Curasorb®, remboursé depuis 2011), qui vont contrôler idéalement le taux d'humidité sur la plaie pour en permettre la bonne évolution. Rappelons à cette occasion que les alginates ont des propriétés hémostatiques appréciables après un geste de débridement.
Des nouveaux sets de soin de détersion devraient être prochainement mis sur le marché, sous réserve qu'un accord tarifaire soit trouvé entre la CEPS3 et les fabricants. Il est prévu que ces sets contiennent davantage de matériel (curettes, bistouris), mais plus de pansement primaire (ou gel). Ce n'est pas pour autant qu'un set devra être systématiquement prescrit lorsqu'une escarre se nécrose. La détersion d'une plaie est un acte de soin fréquent, parfois ponctuel ou urgent, qui doit pouvoir être assuré avec ou sans set de soin.
En phase de bourgeonnement, un grand choix de pansements est disponible (hydrocellulaire, alginate, fibres de CMC) dès lors qu'ils préservent un milieu humide sans excès de macération. Le degré d'humidité peut être modifié avec une fixation type film semi perméable (ex. : Op Site® Hypafix® Transparent, Leukomed® T), si le pansement n'en est déjà pas recouvert (ex. : les hydrocellulaires, Allevyn®). C'est bien souvent le confort du patient, la facilité de manipulation du produit, les habitudes et la fréquence des soins qui vont orienter le choix d'un produit (et une marque) plutôt qu'un autre.
Les pansements inhibiteurs de protéases, maintenant disponibles sous forme d'interface (Matrice®. Non remboursé) ou associés à un hydrocellulaire (UrgoStart®) peuvent être appliqués à cette phase pour corriger l'excès de MMP4 qui peut expliquer d'importants retards de cicatrisation. Présentés comme des « accélérateurs de cicatrisation », ces produits doivent être utilisés à bon escient, d'où la mise à disposition récente d'un outil diagnostic permettant d'évaluer sur la surface de la plaie la présence de métalloprotéases en trop grand nombre: le capteur Wound Check® (non remboursé).
Si l'escarre est profonde ou si une chirurgie est envisagée, un traitement par pression négative (TPN type VAC®, Renasys®) peut être mis en place, imposant alors une hospitalisation classique ou une HAD5. De nouveaux pansements hydrocellulaires capables d'exercer sur la plaie une dépression grâce à un moteur ultra léger et compact (sans réservoir), devraient être prochainement commercialisés. C'est le cas du PICO de Smith and Nephew. Sans remplacer la TPN, ces dispositifs pourraient être un intermédiaire intéressant disponible en ville, sur des escarres peu profondes et moyennement exsudatives.
Dans tous les cas, il n'est plus autorisé d'associer plusieurs pansements sur une même plaie.
Le recouvrement d'un pansement primaire (en contact avec la plaie) doit donc être assuré par des compresses simples ou absorbantes (dites « pansement américain »).
Plusieurs attitudes peuvent être envisagées en cas d'infection locale
1) laver et drainer la plaie mécaniquement et à l'aide de pansements type fibres de CMC1 (Aquacel®) ou alginate (ex. : Algosteril®),
2) appliquer un pansement qui relargue un antimicrobien type ions Ag (ex. : Release® Ag) ou PHMB2 (ex. : Suprasorb® X PHMB),
3) appliquer un antiseptique à large spectre (ex. : Bétadine®) après détersion de la plaie étant donné que la plupart de ces produits ont une action inhibée par la présence de matières organiques
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